« L’accaparement des terres au Burkina Faso : Cas de la province du Kadiogo » est le mémoire de fin d’étude de Léon Kouama, pour l’obtention d’un diplôme de cycle A de l’école nationale des régies financières. Un document qui a valu une note de 17/20 à Léon Kouama par les membres du jury à , ce 21 septembre 2021, à Ouagadougou. Dans ce document, il propose des solutions pratiques à mettre en œuvre pour solutionner la problématique de l’accaparement des terres au Burkina Faso, en prenant l’exemple pratique de la province du Kadiogo.
Pour planter le décor de son exposé, Léon Kouama a laissé entendre que la population burkinabè augmente à une vitesse vertigineuse. Celle de la province du Kadiogo a connu une croissance de plus de 60% entre 1996-2006 et n’est pas sans conséquence sur l’occupation des terres provinciales avec une prolifération des activités des promoteurs immobiliers pour résorber le problème de logement. Pour lui, cette pression accrue sur les terres par les promoteurs immobiliers d’une part, et d’autre part par les particuliers a des fins divers est dû à un dualisme de gestion foncière avec pour corollaire des risques de corruptions, de fraudes, de dépossessions des terres et d’injustice dans l’allocation des terres.
Léon Kouama pense que ce sont tous ces facteurs qui ont motivé le choix du thème de son mémoire, qui est : « L’accaparement des terres au Burkina Faso : cas de la province du Kadiogo ».
Comment le phénomène d’accaparement se manifeste-il ?
Pour Léon Kouama, la question de la terre est très complexe, et est à l’origine de nombreux contentieux impliquant les systèmes économiques, sociaux, politiques, culturels et souvent religieux. Ainsi, pourquoi le phénomène d’accaparement des terres persiste toujours malgré les nombreuses révisions de textes juridiques sur le foncier ? Afin de mieux opiner sur cette préoccupation centrale, il est nécessaire que des réponses soient données aux interrogations suivantes : quelle est la place des textes dans le phénomène d’accaparement des terres ? Quel est le rôle des acteurs du foncier dans le phénomène d’accaparement des terres ? Quelles réformes faut-il envisager pour une gestion saine du domaine foncier national (DFN) ?
Cependant, pourquoi le choix de la province du Kadiogo ?
Selon Léon Kouama, de manière générale, son étude a pour objectif de contribuer à l’amélioration d’une gestion rationnelle des terres du DFN afin d’y apporter des solutions pratiques et novatrices. « De manière spécifique, il s’agira pour lui : de montrer la place des textes dans le phénomène d’accaparement des terres ; de situer la responsabilité des acteurs du foncier dans le phénomène d’accaparement des terres ; d’envisager des réformes pour assainir la gestion du DFN ».
Léon Kouama a ajouté que pour l’atteinte de ces objectifs, il est parti de deux hypothèses à savoir « les textes portants gestion du DFN qui sont à l’origine de l’accaparement des terres et le comportement des acteurs de la chaine foncière favorisant le phénomène d’accaparement des terres ». Puis, de poursuivre qu’au Burkina Faso, le système foncier a connu trois grandes périodes marqué par plusieurs étapes. La 1ère période est le règne exclusif des pratiques foncières basées sur les coutumes locales gérer par un administrateur unique qui a contracté une alliance sacro-sainte avec les puissances invisibles, véritables propriétaires du sol et où la terre n’entre pas dans le commerce.
La seconde période coloniale pendant laquelle le colonisateur a introduit la propriété privée et la marchandisation de la terre. La dernière période post-coloniale ou le fait marquant est l’adoption par ordonnance en 1984 la réorganisation agraire et foncière par le pouvoir révolutionnaire en modifiant le statut de la terre par la création d’un domaine foncier national et en attribuer la propriété exclusive à l’Etat. Elle a subi par la suite des relectures notamment en 1991, 1996 et dernièrement en 2012 pour tenir compte de l’évolution de la vie socio-politiques du pays. Auparavant, la mise en place de la politique nationale de sécurisation foncière en milieu rural (PNSFMR) en 2007 a conduit à adopter la loi portant foncier rural en 2009. Ces 2 dernières lois pourraient en partie expliquer le phénomène d’accaparement des terres.
Les enquêtes (question sur l’existence du phénomène d’accaparement des terres) 90% des personnes qui ont étés questionnés attestent avoir déjà entendu parler du phénomène d’accaparement des terres,100% des leaders d’opinion, notamment des élus locaux, des chefs de services, des agents des services domaniaux et des chefs traditionnels affirment tous avoir entendu parler du phénomène. Les demandes de terres 3 175 demandes de terrains ont été traitées par le SCTF-C entre 2015-2020 pour une superficie totale de 6 024 ha. 1 028 demandes ont été satisfaites dans les livres de la DGUVT(2012-2014) pour 14 216 ha.
Selon l’ONF-BF, les demandes d’APFR à titre individuel sont prisées : 5 322 ha contre 354 ha seulement à titre collectif soit 15 fois plus. 10 920 ha soit 109 200 000 m² ont été acquis régulièrement par les promoteurs immobiliers. 39% des enquêtés soumis aux questionnaires classent les textes en tête des causes du phénomène d’accaparement ;100% des personnes interviewées incriminent les textes ; Cela se manifeste par la gestion sectorielle de délivrances des titres d’occupation (le cas de l’Attestation de Possession Foncière Rurale ).
Vérification de l’hypothèse 2
Léon Kouama défend que « 32% des enquêtés indiquent que le comportement des agents a favorisé la ruée vers la terre par les particuliers et les promoteurs immobiliers. 76% des enquêtés ayant renseignés les questionnaires, font le classement de comportement suivant : Le comportement des acteurs de la chaine foncière peut s’explique par l’acquisition de terrains des promoteurs immobiliers par des délibérations de conseil municipal aux mépris des textes en vigueurs. C’est le cas de cette commune rurale qui en trois (03) ans, a fait vingt-huit (28) délibérations au profit de seize (16) promoteurs immobiliers sur plus de 8 000 ha ; l’agrobusiness et la spéculation foncière ».
Pour Léon Kouama, les démonstrations montrent que les textes portants gestion du foncier et le comportement des agents de la chaine foncière sont les déterminants essentiels du phénomène d’accaparement dans la province du Kadiogo et partant du Burkina Faso.
Au plan législatif, Léon Kouama encourage de « Conférer la propriété du DFN à l’Etat central comme le suggèrent 73,2% des enquêtés ;Proposer un code unique du foncier pour harmoniser les pratiques. Il préconisons la relectures les textes fonciers afin d’avoir au plan institutionnel, la création d’une agence nationale du foncier,
Le renforcement des outils de gestion foncière (le Sif et le cadastre) ; Créer un métier de gestionnaire de foncier au titre des mesures d’accompagnement. D’ores et déjà, faire une sensibilisation à grande échelle des populations rurales aux méfaits de ces ventes incontrôlées : dynamiser les missions des GUF pour lutter contre le faux et usage de faux; Elargir l’assiette fiscale par l’imposition des nouveaux acteurs.