Le sommet de la CEDEAO tenu à Accra au Ghana, le dimanche 3 juillet 2022, a entériné les 24 mois de transition (à compter du 1er juillet) demandé par le gouvernement burkinabè. En effet, dans le chronogramme soumis au sommet, le gouvernement a consenti à réduire la durée de la transition suite au rejet des 36 mois par la CEDEAO. En somme, la transition durera au total 30 mois comme l’avait recommandé la commission technique.
On savait depuis le début que les 36 mois fixés par la charte de la transition ne prospèrera pas devant les organisations régionales, notamment la CEDEAO. Mais les putschistes du 24 janvier 2022 semblent avoir appris des déboires de leurs homologues maliens. Ils ont sans doute monté les enchères pour pouvoir négocier avec la CEDEAO. Les participants aux fameuses assises nationales et les OSC (Organisations de la société civile) de soutien ont été royalement ignorés. Ceux-ci avaient rejetés les 30 mois de la commission technique pour retenir 36 mois pour la durée de la transition.
Depuis quelques semaines, l’on s’éloignait déjà des discours arrogants et suffisants du départ qui prétendaient que le Burkina ne courrait pas derrière des délais et que « nous avons décidé que c’est 36 mois, donc la transition durera 36 mois ».
Au terme du deuxième passage du Médiateur Mahamoudou Issoufou, désigné par la CEDEAO à Ouagadougou, le discours avait changé. Le premier ministre Albert Ouédraogo évoquait un compromis dynamique dans le sens de la réduction de la durée de la transition.
Réunis en sommet extraordinaire à Accra, les chefs d’Etats et de gouvernement, après avoir pris connaissance du rapport du médiateur, a décidé d’entériner les 24 mois sollicités par le gouvernement de transition à compter du 1er juillet. Si l’on ajoute les 5 mois déjà consommés, la transition durera 29 et une semaine. L’on est en deçà des 30 mois proposés par la commission technique.
A la vérité, face la dégradation continue de la situation sécuritaire, la junte est aux abois et peine à convaincre même ses soutiens de ses capacités à redresser la situation sécuritaire. Seuls quelques solitaires continuent de s’exciter. A cela s’ajoutent des glissements politiciens qui sapent progressivement le peu qui reste du capital de sympathie dont les putschistes avaient bénéficié à leur prise de pouvoir. De plus en plus, des voix s’élèvent pour demander la démission du Président Damiba. La classe politique se remet en ordre de batailles pour ne pas laisser la junte occuper le terrain politique. Plusieurs fronts de contestations s’organisent progressivement. La sérénité semble foutre progressivement le camp chez les nouveaux maîtres du pays qui doivent également maintenir la cohésion interne. Bref, l’heure n’est pas à une tension inutile avec la CEDEAO, pendant que le front intérieur est en ébullition.
Il reste maintenant à veiller à ce que les militaires respectent leurs engagements pour que le 1er juillet 2024 au plus tard, un nouveau pouvoir démocratiquement élu prenne le relais de cette transition dans un pays dont l’essentiel du territoire aura été débarrassé des groupes terroristes. En tous les cas, seuls des résultats sur ce terrain de la sécurité pourraient garantir non seulement le retour à l’ordre constitutionnel au délai prescrit mais également la durée de la transition pendant 24 mois. Sans résultats probants dans la lutte contre l’insécurité, les 24 mois resteront comme l’horizon pour les putschistes.
Ben Latif OUEDRAOGO