Tribune/Burkina Faso : Pourquoi je ne soutiens pas le MPSR du lieutenant-colonel Damiba ?(Adama Amadé Siguiré)

Le 24 janvier, je terminais mon livre sur le terrorisme dans mon cabinet, quand le MPSR faisait son communiqué à la télévision nationale. J’étais saisi par deux sentiments: celui de la peur et celui de l’espoir. Peur d’un avenir incertain pour le Burkina Faso et l’espoir de voir Damiba et ses hommes rompre avec la France et ses valets pour opter définitivement pour le courage, pour le patriotisme pour le sacrifice, pour la rupture. Je recevais de nombreux appels des Burkinabè qui exprimaient leur joie face à l’avènement du MPSR.

Deux jours plus tard, je me suis dit que le MPSR mérite notre soutien. Pour que ces militaires réussissent, il faut que nous les soutenions, que nous les accompagnions. Et j’étais déjà dans une position où j’avais affiché tout mon soutien au pouvoir malien par mes écrits. Et j’étais même prêt à être le conseiller des autorités maliennes. Pourquoi soutenir les autorités maliennes et refuser de soutenir la transition au Burkina? Suis- je un apatride? Silga, mon village, nest-il pas occupé par les terroristes depuis près de deux ans?

Mais, il y’a une réalité. Les mossis disent que c’est le propriétaire du chien qui doit attraper sa tête s’il veut que les autres l’aident à l’abattre. En clair, je me suis rendu compte qu’il ne nous appartenait pas de dire à DAMIBA où aller? C’est lui qui a fait son coup d’État. C’est lui qui doit prendre la bonne direction et nous, nous allons le soutenir. C’est GOITA qui a décidé de rompre avec la France pour suivre la volonté du peuple malien. Alors, qui suis-je pour dire à DAMIBA, voilà la bonne voie? Il faut impérativement emprunter cette voie. DAMIBA est le conducteur de cette transition. Mais, j’étais sûr d’une chose: je ne soutiendrais pas le MPSR dans le doute, par la force. Je ne soutiendrais pas le MPSR si DAMIBA et ses hommes refusent la rupture, le courage, la détermination et le patriotisme. J’ai horreur de la lâcheté, du manque de détermination, du suivisme béat, de l’indécision. Et je ne soutiendrai pas des hommes qui sont sur cette voie.

Du reste, pourquoi ai-je toujours refusé de soutenir le MPP alors que de nombreux intellectuels Burkina étaient à la solde de ce pouvoir? Roch et ses hommes étaient pour moi des politicards, des hommes d’affaires, des chercheurs d’argent, qui se moquent de l’avenir du Burkina Faso. Et s’il faut remplacer un ROCH civil par un Roch militaire, ce militaire non plus n’aurait pas mon soutien. Je ne serai jamais le griot d’un homme, d’un groupuscule, aussi forts et puissants qu’ils soient. La liberté se trouve dans le refus et non pas dans l’acceptation. J’attendais donc que DAMIBA se dévoile pour me déterminer, pour savoir si je vais soutenir le MPSR ou pas.

Aujourd’hui, en cette période de guerre, de crise, la ligne politique de DAMIBA ne souffre pas de débat à moins qu’on ne soit un myope. Cet homme qui est arrivé au pouvoir le 24 janvier est un véritable restaurateur, mais un restaurateur politique alors que moi, je m’attendais à un restaurateur national et territorial. DAMIBA n’est pas venu pour faire la guerre. Il est venu pour faire la politique dans une période de guerre. Tous ses actes le démontrent quand il tente de nous dire le contraire par son discours.

Pour vaincre le terrorisme, le Burkina est condamné à s’aligner derrière le Mali qui fait déjà de bons résultats. Nous avons le même mal et nous subissons le même malheur. Quand BILGO dit que le Burkina n’est pas le Mali, cela relève de l’arrogance et de la ferme volonté du MPSR de conduire ce peuple à l’abattoir. Nous ne pouvons pas gagner cette guerre avec les méthodes du MPSR qui relèvent de la manipulation et d’un manque de patriotisme.

Aujourd’hui, les terroristes avancent. Et nous n’avons pas le droit de nous taire. Le MPSR détient l’avenir de la Nation. Si les populations ne veulent pas toutes mourir, elles doivent forcer DAMIBA à opter pour la rupture, pour la guerre ou pour la démission. Il est inconcevable et inacceptable qu’en cette période où l’existence de toute une Nation est en jeu, un homme refuse d’opter pour le courage, pour la rupture, tout en étant à la tête de la Nation.

Pourquoi alors DAMIBA a fait son coup d’État, s’il est moins courageux que Roch KABORE ? Je voudrais le savoir. La mission de DAMIBA était-elle de chasser le MPP du pouvoir?

Il y a des gens qui m’accablent de tous les maux, de toutes les injures, disant que je refuse de soutenir le MPSR parce que je n’ai pas eu un poste. C’est l’affirmation de la médiocrité de nombreux Burkinabè. Je répète encore que je suis né dans une famille pauvre qui ne connait pas la notion de pouvoir.

Je n’ai jamais dit que je soutiendrais le président qui viendrait après Roch KABORE. Et je n’ai pas combattu Roch KABORE, mais la mauvaise politique du MPP. Si Roch veut me voir, je suis disponible. Je me bats au quotidien contre moi-même, contre la haine, et je ne la laisserai pas être maîtresse de ma vie. DAMIBA qui était le signe de mon espoir est aujourd’hui le symbole de mon désespoir.

 Il est un homme indéterminé, qui n’a pas de projet, qui ne veut pas prendre de grands risques pour sauver le Burkina. Et nous allons perdre du temps avec cet homme. Il n’est pas la solution à notre mal. Il ne veut pas l’être. Peut-être aussi qu’il ne peut pas l’être. Et je ne vais pas suivre un homme de mon âge, de ma génération qui refuse de s’assumer, qui a peur des risques, qui veut satisfaire une vieille classe politique rejetée par le flux de l’histoire. Si j’ai refusé de soutenir ROCH qui est de la génération de mon père, ce n’est pas DAMIBA, le fils, qui est de ma génération et refuse la rupture qui aura mon soutien.

Tant que DAMIBA et ses soutiens se plaisent sur la voie de la continuité, de la servitude, du néocolonialisme, et de la politique politicienne, ils n’auront pas, moi, mon soutien, parce que je ne soutiens pas des dirigeants qui manquent de courage et qui n’ont pas un projet endogène pour sauver la nation de cette guerre qui la décime. En résumé, DAMIBA est pour moi une perte de temps. Il pourrait peut-être me faire disparaitre ou me faire quitter le pays. Les dirigeants qui n’ont pas de projets pour leur Nation en ont toujours pour des individus, et cela pour occuper leur temps.

Adama Amadé SIGUIRE

Écrivain Professionnel/ Consultant.

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