Comme à l’accoutumée, à l’occasion du 1er Mai, fête du travail, l’union d’action syndicale (UAS) livre un message à l’ensemble des travailleuses et travailleurs. Elle peint la situation du monde du travail et les conditions dans lesquelles les travailleurs évoluent, lance un appel à une amélioration des conditions dans un contexte particulièrement éprouvant pour les Burkinabè dans leur ensemble.
En ce jour historique du 1er mai, l’Unité d’Action Syndicale adresse son salut militant à ses adhérents et adhérentes, à ses sympathisantes et sympathisants et à l’ensemble des travailleuses et travailleurs du Burkina Faso et du monde. Comme chaque année, à l’instar des travailleurs du monde entier, nous faisons cette halte pour d’abord rendre hommage aux devanciers, particulièrement aux ouvriers de Chicago ; ensuite pour analyser la situation dans laquelle nous évoluons en vue de tracer les sillons de l’avenir.
Avant de procéder à cette analyse, nous vous invitons à observer une minute de silence à la mémoire de tous les camarades, qui nous ont quittés depuis l’année dernière, mais aussi à la mémoire des éléments des Forces de Défense et de Sécurité (FDS), des volontaires pour la Défense de la Patrie (VDP) et des civils qui ont trouvé la mort du fait des attaques terroristes.
Camarades militantes et militants,
Le monde vit une crise multidimensionnelle, accompagnée d’un aiguisement des contradictions à la fois entre les puissances et blocs impérialistes, entre ceux-ci et les peuples et enfin entre la bourgeoisie et le prolétariat. Cette crise touche tous les segments de la vie.
- Sur le plan économique, tous les pays sont confrontés à des taux de croissance très faibles et surtout à l’augmentation des prix des matières premières et partant, des prix des produits de grande consommation.
- Sur le plan social, on assiste au développement du chômage, de maux comme la drogue, l’alcoolisme, la prostitution et le banditisme et à l’accroissement de la pauvreté.
- Sur le plan politique, l’inconséquence des hommes politiques a partout provoqué le désenchantement des populations, se traduisant par de forts taux d’abstention aux élections, comme en témoignent les résultats des dernières élections en France.
Confronté à ce contexte difficile, les travailleuses et les travailleurs, de même que les peuples engagent des luttes multiformes qui expriment leur refus de payer les frais de la crise : luttes des travailleuses et des travailleurs et de différentes couches populaires.
Après la COVID19 dont les effets se font encore sentir et que de nombreux pouvoirs ont exploitée pour restreindre les libertés et droits des populations, un fait particulier marque la situation internationale. Il s’agit de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, une guerre qui traduit l’exacerbation des contradictions inter-impérialistes et qui impacte sérieusement la vie des populations dans tous les pays du monde et qui présente les risques de déboucher sur une troisième guerre mondiale. Le déclenchement de cette guerre résulte de longs mois de tensions entre les deux pays, la Russie n’acceptant pas le rapprochement de l’Ukraine avec les démocraties occidentales, encore moins son adhésion à l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN).
Camarades travailleuses et travailleurs,
La situation sur le continent africain témoigne globalement de la faillite des Etats néo-coloniaux.
Cette faillite se traduit par la situation désastreuse des économies, en contradiction avec les richesses dont regorge le continent, par les coups d’Etat militaires, l’aggravation de la misère, le très faible accès aux services sociaux de base (éducation, santé, logement, …). Il s’agit d’une faillite cultivée et entretenue par les puissances impérialistes qui s’appuient sur des classes politiques ayant fait le choix de trahir les intérêts de leurs peuples. Il en résulte le renforcement de la domination des états comme l’illustrent les faits suivants : la poursuite de la domination monétaire française dans les pays francophones, les coups d’Etats militaires au Mali, en Guinée Conakry, au Burkina Faso, le bradage du chemin de fer par les gouvernements du Burkina Faso et de la Côte-d’Ivoire, la concession par l’Etat burkinabè de la gestion de l’aéroport de Donsin, signée avec MERIDIAM–AMP, l’installation de bases ou troupes militaires étrangères dans de nombreux pays.
Dans la sous-région ouest-africaine, le fait marquant est la naissance et le développement d’une grave crise sécuritaire provoquée par des groupes terroristes et aussi des bandes de bandits armés guidés par l’ambition de mettre en place des Etats islamiques et/ou intéressés à exploiter les richesses et organiser des trafics divers (or, drogue, cigarette, carburant, armes, …). En fait, le terrorisme est à la fois un produit et un moyen de l’impérialisme pour continuer à opprimer et à exploiter les pays et les peuples de notre sous-région. En effet, le terrorisme est utilisé par les puissances impérialistes pour s’installer ou renforcer leur présence dans les pays à travers des bases ou troupes militaires. Le paradoxe, c’est que l’installation des bases militaires étrangères coïncide avec un développement du terrorisme (multiplication des attaques, occupations de pans entiers des territoires, …). L’échec de l’intervention des puissances étrangères est matérialisé par le G5 Sahel créé sous l’instigation de l’impérialisme français mais qui n’a pu mener aucune action notable contre le terrorisme.
Il est à noter que face aux anciennes puissances coloniales, décidées à défendre leurs pré-carrés et leurs intérêts, de nouvelles puissances apparaissent, prêtes à prendre pied dans le continent pour tirer profit de ses immenses richesses et pour d’autres intérêts géostratégiques et géopolitiques. Il s’agit notamment de la Russie, des Etats-Unis, de la Chine, de la Turquie et de l’Inde.
Sur le plan national, notre pays vit une crise multiforme marquée essentiellement par :
- Le coup d’Etat du 24 janvier 2022 qui a porté au pouvoir le Mouvement Patriotique pour la Sauvegarde et la Restauration (MPSR) dirigé par le lieutenant-colonel Paul Henri Sandaogo DAMIBA. Après avoir levé la suspension de la constitution, le nouveau président s’est fait investir par le Conseil Constitutionnel et a prêté serment pour une transition de trois (3) ans. Une assemblée législative a été mise en place dans laquelle l’exécutif s’est assuré une majorité confortable avec les députés désignés par le président (21) et ceux désignés par le FDS (16), ce qui donne au pouvoir une majorité absolue de 37 députés sur les 71 que compte l’Assemblée législative de Transition (ALT). A propos de ce coup d’Etat, l’UAS a décliné la participation à l’élaboration des orientations de la transition aussi bien qu’aux organes de la transition. Tout en indiquant clairement qu’elle s’en tenait à sa mission traditionnelle de défense des intérêts matériels et moraux des travailleuses et travailleurs, des populations et de veille citoyenne, elle a souligné son ferme attachement au respect des libertés démocratiques et syndicales. Plus de trois (3) mois après sa prise du pouvoir, le MPSR apparaît impuissant face aux attaques terroristes qui se sont amplifiées ; la misère s’étend avec une inflation galopante ;
- L’aggravation de l’insécurité qui prend les contours d’une guerre civile impliquant les groupes armés terroristes d’un côté et de l’autre les FDS et les VDP. A ce jour, les attaques terroristes ont causé plus de deux mille (2000) morts, de très nombreux blessés, près de 2 millions de Personnes déplacées internes (PDI), la fermeture de près de 4 mille écoles ayant mis hors des classes plus de 523 000 élèves et plus de 15 000 enseignants ;
- La tenue du procès Thomas SANKARA. Ce procès a abouti à la condamnation à perpétuité de Blaise COMPAORE, de Gilbert DIENDERE, de Hyacinthe KAFANDO (principaux accusés dans l’assassinat de Thomas SANKARA) ;
- Une certaine agitation dans le monde politique, guidée par le souci de se faire une place dans les organes de la transition et/ou de préparer les élections à l’issue de la transition. De nombreux discours politiques évoquent abondamment la cohésion sociale, l’unité et la réconciliation nationale, le vivre ensemble et même l’union sacrée. Derrière la plupart de ces discours, se cache la volonté de promouvoir l’impunité des crimes de sang et des crimes économiques. Cependant, les actions quotidiennes dominées par les trahisons, les scissions et mise en place de nouvelles alliances révèlent un faible attachement à la patrie. Au contraire, ce sont les intérêts personnels, liés au maintien ou à l’accession au pouvoir qui guident les uns et les autres, l’objectif étant de jouir de prébendes de la gestion du pouvoir. Le fait nouveau, c’est l’implication ouverte de nombreux acteurs de la société civile dans les alliances et tractations politiques.
Camarades militantes et militants,
Camarades travailleuses et travailleurs,
L’UAS, comme elle a eu l’occasion à plusieurs reprises de le signifier aux nouvelles autorités, est fortement attachée au respect des libertés démocratiques et syndicales.
En ce jour solennel, elle tient à réitérer cet attachement. Cela est d’autant important que nous avons noté des attaques contre les libertés démocratiques et syndicales : interdiction de manifestations, annonces de restrictions des libertés allant jusqu’à l’extension de l’Etat d’urgence à l’ensemble du territoire. A ce propos, elle exprime sa solidarité avec les organisations professionnelles des médias qui ont récemment interpellé les autorités sur les actes attentatoires à la liberté d’expression et la de presse. C’est l’occasion pour l’UAS d’interpeller les autorités de la transition sur la nécessité :
- de mener une lutte résolue contre le terrorisme, en vue d’assurer la sécurité des personnes et des biens et le retour des personnes déplacées internes dans leurs localités. Dans ce sens, il importe qu’une solution soit trouvée à la fermeture des sociétés minières (cas de Youga et Taparko), qui met au chômage des centaines, voire des milliers de travailleurs ;
- de mener une lutte tout aussi résolue contre la corruption dont les liens avec le développement de l’insécurité sont évidents ;
- d’œuvrer à identifier et punir tous les auteurs de crimes économiques et de sang.
Non aux atteintes aux libertés et droits des citoyens !
Non à une réconciliation nationale fondée sur l’impunité !
Bonne fête du Travail à toutes et à tous !
Vive le 1er mai !
Vive l’Unité combattante des travailleurs !
Vive l’Unité d’Action Syndicale !
Ouagadougou, le 1er mai 2022
Ont signé :
Pour les Centrales Syndicales :
CGT-B CNTB CSB
Moussa DIALLO Marcel ZANTE Olivier Guy OUEDRAOGO
Secrétaire Général Secrétaire Général Secrétaire Général
FO/UNS ONSL USTB
El Hadj Inoussa NANA Paul N. KABORE Ernest OUEDRAOGO
Secrétaire Général Secrétaire Général Secrétaire Général
Pour les Syndicats Autonomes :
SAMAE SATB SATEB
Pambary Cyrille Pascal BONZI Boukary BELEMBAOGO Bernard ZONGO
Secrétaire Général Secrétaire Général Secrétaire Général
SBM SNEAB SNESS
Nestor KIENTGA Siaka TRAORE Anatole ZONGO
Secrétaire Général Adjoint Secrétaire Général Secrétaire Général
SYNTRAPOST SYNAPAGER SYNATEB
Alain SOME Windyam ZONGO François De Salle YAMEOGO
Secrétaire Général Secrétaire Général Secrétaire Général
SYNAPIB SYNTAS SYNATEL
Pascal OUEDRAOGO Juste Koumara LOGOBANA Soulémane SO
Secrétaire Général Secrétaire Général Secrétaire Général
SYNATRAD SYNATIC SYNATIPB
Blaise R. NEBIE Siriki DRAME Rigobert TOE
Secrétaire Général Secrétaire Général Secrétaire Général
SYSFMAB UGMB
Inès KABORE Bali KAGAMBEGA
Secrétaire Générale Secrétaire Général