L’ancien président ivoirien a foulé sa terre natale pour la première fois depuis près de dix ans, le jeudi 17 juin 2021. Cet homme politique aux multiples facettes pourra-t-il troquer sa tunique politique pour porter manteau d’homme de paix et de cohésion sociale ? Quelques mois avant la présidentielle d’octobre 2020, des proches de Laurent Gbagbo avaient souligné la nécessité « d’une réconciliation des Ivoiriens ». Mais au-delà de Gbagbo, toute la classe politique ne doit pas rater ce virage.
Estimé comme un maillon essentiel de la réconciliation nationale, Laurent Gbagbo est redevenu un acteur incontournable pour la paix et la stabilité de la Côte d’ivoire. Le « woody de Mama » est là, scandaient les partisans, comme s’ils ne croyaient plus à ce retour. De l’aéroport international Félix Houphouët Boigny qu’il a foulé à 16h15, en passant par des quartiers populaires, le cortège avait du mal à se frayer un passage. Laurent Gbagbo peut se vanter d’avoir reçu un accueil fait de liesse populaire, bien loin de celui en catimini que certains voulaient imposer à ses partisans. Toute qui illustre éloquemment que la Côte d’Ivoire reste toujours fracturée par de longues années d’instabilité politique et de violences.
Pour les autorités, ce retour s’effectue « au nom de la réconciliation nationale » mais, après l’échec des précédentes tentatives, ce retour constitue un test pour toute la scène politique ivoirienne. Quelques mois avant la présidentielle d’octobre 2020, des proches de Laurent Gbagbo avaient souligné la nécessité « d’une réconciliation des Ivoiriens ».
Mais la première déclaration du « Woody de Mama », à son QG a levé un coin du voile sur les ambitions de l’homme à en croire certains observateurs politiques. D’abord le choix du QG n’est pas fortuit. C’est peut-être la preuve que Gbagbo est revenu avec l’intention de reprendre le combat là où il l’a laissé.
Le retour de Gbagbo contribuera-t-il à la réconciliation ?
Du côté du pouvoir, Alassane Ouattara essaie sans doute de redorer son image, écornée à l’étranger par un troisième mandat controversé. Point noir de ses dix premières années au pouvoir, la réconciliation est devenue l’une de ses priorités. « Il a cette volonté de présenter la Côte d’Ivoire comme une démocratie qui avance, malgré certaines périodes de violences », déclarait le politologue Ousmane Zina.
En 2001, le forum national de la réconciliation n’a pas permis de mettre en place les wagons, encore moins le train de la réconciliation nationale.
L’administration Ouattara en 2011 a procédé à la création d’une Commission dialogue, vérité et réconciliation. Les travaux de cette commission, faiblement dotée en moyens humains et financiers, ont été parasités par des calculs politiciens. Entre sa volonté affichée de rassembler les Ivoiriens et son désir de consolider les piliers de son pouvoir, le régime du président Ouattara a davantage mis l’accent sur la stabilité et le développement économique du pays que sur la réconciliation.
Mais depuis sa réélection controversée, il a créé un ministère de la réconciliation, occupé par son seul opposant à la présidentielle, Kouadio Konan Bertin.
Si pour certains, le retour de Koudou constitue une opportunité pour une réconciliation nationale inclusive franche et sincère, pour d’autre elle est déjà en marche et sa présence va donner un coup d’accélérateur au processus. Et Gbagbo lui-même l’avait souligné lors d’une interview accordée à TV5 Monde avant la présidentielle de 2020 qu’il parlera à son peuple une fois de retour en Côte d’Ivoire.
La Côte d’Ivoire est dans une situation délicate et doit négocier ce virage dangereux avec le concours de tous. Il n’y a pas de leader politique (du pouvoir ou de l’opposition) sans Côte d’Ivoire. La Côte d’Ivoire d’abord et avant tout !