26 décembre 2024
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Burkina Faso : Un instituteur condamné pour avoir violenté sa marâtre

L’instituteur certifié Ibrahim Zoungrana a été condamné par le Tribunal de grande instance Ouaga 1 pour coups et blessures volontaires sur la première épouse de son père. L’audience a eu lieu en décembre 2020 pour juger les faits déroulés en septembre 2019.

Ibrahim Zougrana a été reconnu coupable de coups et blessures volontaires et condamné à 12 mois d’emprisonnement avec sursis plus une amende de 250 000 francs CFA. Il doit payer à la victime plus de 2 millions et verser également 300 000 francs comme frais exposés non compris dans les dépens.

C’est le verdict du Tribunal de grande instance de Ouaga 1 dans l’affaire qui oppose l’instituteur certifié Zoungrana au procureur du Faso.

C’est suite à des mésententes dans la cour familiale que l’enseignant du primaire a porté la main sur la première épouse de son père au quartier Patte d’Oie de Ouagadougou. Les faits sont graves. Surtout quand on considère la qualité de la victime : c’est la première épouse du père du mis en cause. Donc « sa maman », comme on le dit en Afrique.

Je l’ai giflée. Elle est tombée et s’est blessée

Selon l’instituteur poursuivi, tout a commencé dans la cour familiale. « J’étais couché. J’ai entendu du bruit. C’est mon enfant qui pleurait. La vieille lavait des chaussures. Quand je suis sorti, l’enfant m’a vu et a couru venir vers moi. Les autres enfants m’ont dit que c’est « mami » qui l’a frappé avec un bâton. Ça ne m’a pas plu. L’enfant est malade. Je suis allé dire à la vieille que je ne veux plus qu’on frappe l’enfant. La vieille m’a dit qu’elle va maintenant bien frapper l’enfant. Effectivement, elle a commencé à frapper l’enfant. Quand elle a voulu taper l’enfant, j’ai bloqué. Je l’ai poussée. Elle est tombée devant la porte de la maison du vieux. On s’est insulté. Elle m’a tapé avec une assiette. Je l’ai giflée. Elle est tombée et s’est blessée. On l’a amené à l’hôpital ». C’est en substance le récit de l’enseignant qui a osé porter la main sur celle qui l’a vu naitre.

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Est-ce qu’on frappe sa maman ? Vous aurez fait ça à votre propre mère ? Interrogent les juges. L’instituteur hésite à répondre.

Pour le Tribunal, le prévenu est allé trop loin. « Pensez-vous qu’en Afrique, votre enfant peut vivre en grande famille sans qu’on ne lui porte la main », poursuivent-ils. Mais pour Ibrahim Zoungrana, c’était involontaire ce qui s’est passé. Non, répliquent les juges. « Ce n’est pas involontaire. Vous l’avez poussé, elle est tombée. Elle est revenue vers vous et vous l’avez tapé encore ».

Par la suite, la bagarre entre le jeune enseignant d’une trentaine d’année et la vieille dame de 67 ans s’est transportée dehors. Là encore, la vieille a écopé d’une gifle. Elle est encore tombée. Elle s’en est tirée avec des blessures. La vieille dame saignait selon la vidéo de la bagarre présentée par maitre Ali S. Nadia, avocat de la victime.

« C’est quel enfant de 2 ans qu’on peut pas corriger »

En Afrique, quand une grande personne vous tape, vous devez fuir. Vous ne pouvez pas vous arrêter pour vous battre avec une vieille de 67 ans comme si vous étiez avec votre camarade. Elle n’est ni votre camarade ni votre épouse. Même si c’était avec votre épouse, ce n’est pas acceptable. Vous ne pouvez pas faire du corps à corps avec elle. C’est votre maman, a fait observer les juges.

Mais pour l’enseignant du primaire, la vieille a été  » méchante » envers l’enfant. Et vous vous l’avez montré que vous êtes plus méchant, relance le président du Tribunal. Depuis la violence subie par la victime, elle n’a plus voulu revenir au domicile de son époux. Elle est repartie dans sa famille d’origine. Par la suite, ses enfants ont décidé de la faire partir du Burkina Faso.

Peu avant l’ouverture du procès, l’enseignant a insisté que « la vieille dame soit présente parce que l’enfant aussi a été blessé ». Selon le procureur du Faso, c’est comme si aujourd’hui encore, le prevenu continue d’en vouloir à la vieille pour avoir tapé son enfant. « Mais c’est quel enfant de 2 ans qu’on ne peut pas corriger. Cet enfant-là est né où », s’emporte le procureur.

Six mois fermes plus mandat de dépôt

Pour l’avocat de la vieille dame, maitre Ali S. Nadia, la victime a été blessée à la tête. Le coup fatal s’est fait publiquement. C’était dehors devant les voisins. Cela constitue une circonstance aggravante de l’infraction. « La vieille vendait de la farine. Depuis la bagarre, elle est sans activité. Elle gagnait par mois un bénéfice de 25 000 francs CFA. Elle a eu des douleurs au niveau des épaules et de la tête », détaille l’avocat lors de ses plaidoiries.

Après les premiers soins, la vieille est repartie dans un hôpital pour des examens et a déboursé 56 650 francs. « Nous demandons que monsieur Zoungrana Ibrahim soit condamné à payer cette somme à la dame. Aussi nous réclamons la somme de 500 000 francs comme frais exposés non compris dans les dépens ». Pour l’ensemble des préjudices (moral et douleur), l’avocat a demandé le paiement de dommages et intérêts d’une valeur de 2 millions.

Ce que vous avez fait, on trouve que c’est grave. Vous dites que vous êtes instituteur, et vous ne pouvez pas vous maitriser. On se demande ce que vous enseignez aux enfants.

(Tribunal)

Pour le procureur du Faso, il n’y a pas de doute. Les faits de coups et blessures volontaires sont caractérisés à l’égard de l’enseignant. « Ce qui est choquant, c’est l’attitude du prévenu. L’essentiel, c’est de demander pardon. Mais dès le début, Zoungrana était dans une logique d’affrontement avec cette vieille dame. Quelle grand-mère n’a pas eu le privilège de corriger son petit fils. Avec l’attitude du prévenu, s’il gagne sa propre mère, il ne va pas la laisser. Mais pourquoi un tel acharnement contre une vieille dame ? Il a même répliqué aux injures supposées de la vieille. C’est quel être humain lui-là ? Avec de tels agissements, les valeurs qu’on défend en Afrique n’auront plus de sens », a argumenté le parquet.

Le procureur a demandé une peine d’emprisonnement de 6 mois fermes et une amende de 250 000 francs avec sursis plus un mandat de dépôt contre le prévenu.

Les juges ont partiellement suivi les réquisitions du procureur. L’instituteur Ibrahim Zoungrana a été déclaré coupable mais condamné à 12 mois d’emprisonnement avec sursis et à une amende ferme de 250 000 francs CFA. Il doit également verser plus de 2 millions à la victime.

« Ce que vous avez fait, on trouve que c’est grave. Vous dites que vous êtes instituteur, et vous ne pouvez pas vous maitriser. On se demande ce que vous enseignez aux enfants. Vous auriez pu dormir quelque part ce soir. On ne l’a fait pas pour ne pas priver certaines personnes de moyens de subsistances », a noté à la fin de l’audience le président de la formation de jugement.

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