Ceci est une analyse de Raogo Antoine SAWADOGO sur le cas de la fermeture des frontières. Pour l’auteur, en théorie, les frontières de tous les pays du monde ont toujours été fermées aux trafiquants, aux fraudeurs, aux bandits de grands chemins. Mais cela ne s’applique pas aux pays africains, notamment ceux du sahel où les frontières n’ont jamais constitué une barrière pour les populations des zones frontalières. Lisez!
En théorie, les frontières de tous les pays du monde ont toujours été fermées aux trafiquants, aux fraudeurs, aux bandits de grands chemins, aux coupeurs de route, aux malfrats et plus récemment aux HANI. Ces derniers passent presque toujours difficilement d’une frontière à l’autre, du moins dans le cas des pays gérant plus ou moins conséquemment leurs frontières.
Ceci n’est pas le cas dans la plupart des pays africains, notamment en Afrique de l’Ouest. Pour le cas des pays sahéliens, les frontières n’ont jamais constitué une barrière pour les populations des zones frontalières. Elles sont de fait dans des situations de bi et tri-nationalité échappant en réalité au contrôle de l’une et l’autre nation. Une sorte d’apatridie volontaire.
Aucune mesure de contrôle de la mobilité des personnes et des biens d’une frontière à l’autre n’a produit les effets escomptés sur les populations vivant aux frontières. Il est vrai que certaines études estiment qu’au moins 45% des habitants du Sahel se concentrent dans un rayon de 100 km de part et d’autre des frontières. En fermant les frontières d’un pays, c’est comme si on renforçait la pression sur les échanges aux frontières dudit pays avec les autres pays.
Si déjà les HANI et autres trafiquants passent allégrement d’un pays à l’autre, qu’en serait-il des citoyens forcés de se livrer à toutes sortes d’activités de survie ? C’est comme si on démultipliait à volonté le nombre de trafiquants. En voulant punir un régime dit non démocratique d’un pays par des mesures touchant le bien-être des populations, on oblige les peuples frères de part et d’autre à aiguiser leur instinct de solidarité et surtout de survie.
Les Sahéliens s’y connaissent en la matière, eux qui ont cultivé des réflexes de résilience presque millénaires face aux effets de la sécheresse, des criquets migrateurs, des grandes épidémies, des guerres tribales, etc. Tous les postes de contrôle, qu’ils soient tenus par les policiers, les gendarmes, les douaniers ou les forestiers, sont abandonnés du fait de l’action des HANI. Subséquemment, les denrées alimentaires, les biens d’équipement, et même des armes et carburant passeront sans encombre d’un pays à l’autre.
Ce qui veut dire que les mesures de coercition prises par les institutions communautaires seront inopérantes à terme dans les zones frontières. L’une des résultantes de ces mesures coercitives sera le renforcement du sentiment ANTI-UEMOA/CEDEAO qui viendra s’ajouter à d’autres sentiments de rejet qui ne feront que s’exacerber.
Raogo Antoine SAWADOGO
Ouagadougou, le 20 janvier 2022