Ceci est une tribune du célèbre écrivain guinéen Tierno Monénembo qui dénonce les faux « libérateurs » putschistes. L’écrivain qui avait applaudi tous les putschs récents en Afrique, fustige les nouveaux dieux qui règnent à Bamako, Conakry et Ouagadougou.
Après les présidences à vie, les transitions éternelles ! Nos vrais militaires qui viennent de remplacer nos faux démocrates, ne sont pas pressés de passer le relais, eux, non plus. C’est comme ça en Afrique : le changement ne dure que le temps d’une ovation. Le héros se dépêche d’enfiler les chaussons du tyran déchu et de reproduire trait pour trait ses tics et ses frasques.
Chez nous, le pouvoir change de visage, jamais de nature. « Les bagues partent, les doigts restent », disait, José Saramago, ce génial et malicieux écrivain portugais. Ne rangeons donc pas les armes, le combat n’est pas terminé. Hier, les apôtres du troisième mandat, aujourd’hui, les tenants de la Transition de cinq ans d’âge. Notre vie politique est un dilemme. Nous tanguons ente Charybde et Scylla, je veux dire entre tyrannie et « démocrature », selon que le « guide suprême », il soit en treillis ou en complet-veston.
A nos amis qui nous l’avaient vertement reproché, nous répondons que nous n’avons pas soutenu Assimi Goïka, Mamadi Doumbouya ou Sandaogo Damiba par excès de naïveté mais par excès de désespoir. Mieux valait encore les braises de l’enfer que le paradis selon IBK, Alpha Condé et consorts. Maintenant que l’enfer est là, que les braises, nous les avons jusqu’au cou, nous nous demandons amèrement quelle mouche nous a piqués.
Mon dieu, que c’est dur d’avoir à choisir entre la peste et le choléra !
Assimi Goïka et Mamadi Doumbouya et Sandaogo Damiba avaient pourtant tout pour forcer notre admiration. Ils ont abattu des régimes politiques particulièrement honnis. Ils nous ont promis la justice, le respect des droits de l’Homme, le retour imminent à l’ordre constitutionnel.
Nous avons cru un instant qu’ils étaient nos nouveaux Rawlings, nous qui avons tant besoin de croire. Mais très vite, deux points ou plutôt deux anomalies nous ont conduits à douter de leurs bonnes intentions : le délai particulièrement long (3 à 5 ans, un mandat électif quoi !) de la Transition et (dans le cas de Mamadi Doumlbouya en tout cas), le refus systématique de publier la liste du CNRD, l’organe suprême de la junte guinéenne.